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Le système monétaire médiéval

Mouton d’or de Jean II le Bon
Mouton d’or de Jean II le Bon

Bibliothèque nationale de France

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Au Moyen Âge, la monnaie n'est que l'une des manières de réaliser des échanges, et son usage est complexe en raison du grand nombre d'espèces en circulation. Les pièces d'or, d'argent ou d'alliage (billon) sont cependant de plus en plus utilisées au fil du temps, notamment après le 13e siècle. Ouvrons notre bourse et examinons son contenu...

Depuis les temps mérovingiens, de nombreuses transactions sont réglées, non en monnaie, mais en poids de métal, en travail ou en nature, par compensation voire par troc. L’évolution économique et sociale générale à partir du 11e siècle, la découverte aux 12e et 13e siècles de nouveaux gisements argentifères, les amélioration des techniques minières et métallurgiques permirent toutefois d’augmenter plus facilement la production de pièces et aboutirent à une circulation monétaire plus intense. Ainsi, l’économie médiévale devint de plus en plus monétarisée à partir du 13e siècle, un changement matérialisé par l’apparition de multiples du denier d’argent et la reprise de frappes de monnaies d’or. La monnaie et surtout l’usage de la monnaie se diffusèrent plus largement et plus profondément dans la société qu’auparavant.

Un système tri-métallique

Au 14e siècle les différents types d’espèces en circulation se diversifient au point de constituer, à la suite de mutations, un système monétaire tri-métallique : aux traditionnelles pièces d’or et de bon argent ( « monnaie blanche » ) s’ajoutent les espèces de billon ( « monnaie noire » ), monnaies faites d’un alliage d’argent et d’une forte proportion de cuivre. Par ailleurs était apparue une monnaie non métallique : la lettre de change.

Franc à pied de Charles V
Franc à pied de Charles V |

Bibliothèque nationale de France

Maille blanche de Philippe IV
Maille blanche de Philippe IV |

Bibliothèque nationale de France

Du point de vue économique – et assez schématiquement –, les monnaies d’or et les lettres de change sont plutôt utilisées pour le grand commerce et la haute finance ; l’argent sert, lui, pour le commerce régional ; quant au billon, il est employé pour le marché local et les achats courants. Du point de vue social, l’or resterait ainsi l’apanage des gens d’affaires et des princes, l’argent servirait plutôt aux marchands et le billon au peuple laborieux.

Une répartition par type de transaction, service payé ou produit acheté est moins schématique et sans doute plus proche de la réalité. Depuis le 12e siècle, les pièces sont jugées sur leur valeur intrinsèque, c’est-à-dire sur la quantité réelle ou supposée de métal précieux qu’elles contiennent par rapport à son cours officiel, sa valeur en monnaie de compte1. Chaque monnaie fait donc l’objet d’une demande précise à laquelle l’autorité émettrice doit satisfaire sans y perdre son crédit et surtout son revenu (le seigneuriage2), dont le taux est variable et pour le maintien duquel l’administration royale n’hésite pas à pratiquer des mutations, c’est à dire des changements de la valeur de la monnaie.

Ce système tri métallique est fort difficile à équilibrer. Il dépend d’un marché international des métaux à plusieurs échelons, dont les fluctuations et les spéculations peuvent engendrer une forte instabilité monétaire. En situation prolongée de désordre monétaire, on finit par devoir spécifier avec quelles espèces doit être acquittée une transaction. Là interviennent les professionnels, comptables, changeurs qui font évoluer les systèmes de compte en les raccrochant à de bonnes espèces de référence, telles que le florin italien ou le gros tournois.

Mais dans le royaume de France, le système de compte livre-sou-denier est officiellement maintenu avec autorité dans son exclusivité.

Le système livre-sou-denier

Denier de Charlemagne
Denier de Charlemagne |

Bibliothèque nationale de France

La réglementation monétaire de Charlemagne (793-794) est à l’origine du système de la monnaie de compte médiévale. Il prescrit alors de tailler 240 deniers dans 1 livre d’argent. La monnaie et le système pondéral correspondent. La livre-poids donnant vingt sous de douze deniers de monnaies3, devient livre-monnaie de compte.

Cette équivalence se fixe dans le domaine comptable et persiste en France jusqu’à la Révolution :

  • 1 livre = 20 sous
  • 1 sou = 12 deniers

La monnaie mise en circulation est dite « de paiement », par opposition à la monnaie de compte, unité de valeur qui ne se matérialise pas systématiquement dans une pièce de monnaie.

Notes

  1. Contrairement à la monnaie réelle, la monnaie de compte ne s'incarne pas dans des pièces : c'est une référence stable pour les comptables, les changeurs ou encore les marchands.
  2. Part de bénéfice de la fabrication monétaire prélevée par l'autorité à l'initiative d'une émission.
  3. L'équivalence 1 sou = 12 deniers était déjà en usage dans l'Antiquité romaine.

Provenance

Cet article provient du site Le Franc (2002).

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