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La page avant le codex

Papyrus du Livre des Morts au nom de la chanteuse d’Amon Djed-Khonsou-iou-es-ankh
Papyrus du Livre des Morts au nom de la chanteuse d’Amon Djed-Khonsou-iou-es-ankh

Photo (C) Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Poncet

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Si l’histoire de la page est liée de façon évidente à l’évolution du livre, sa naissance est-elle contemporaine de celle de l’écriture ?
 

Lorsque le scribe mésopotamien aplatissait une boule d’argile pour en faire une tablette aux dimensions de sa main, il réduisait déjà l’expression de la projection du monde aux limites de son corps et donnait une forme pratique au support de ses écrits. « Page », cette tablette recouverte d’écriture cunéiforme au recto et au verso, dont parfois le texte est divisé en colonnes et se termine, déjà, par un « colophon » indiquant le nom du scribe, le titre de l’œuvre, le nombre de lignes ? On y voit même parfois le principe de suite qui prendra le nom de « réclame » dans les manuscrits médiévaux : l’ajout au bas d’une tablette de la première ligne de la suivante. « Livre », l’ensemble des tablettes constituant une même œuvre, l’épopée de Gilgamesh, par exemple ?...

Les Égyptiens, après avoir sculpté leurs premiers hiéroglyphes dans la pierre monumentale, réunissent eux aussi leurs écrits sur un support facile à manipuler : le rouleau de papyrus, composé d’un assemblage d’une vingtaine de feuilles dont la largeur correspond à ce qu’un homme peut embrasser dans un même champ visuel et dont la hauteur ne dépasse pas la longueur de sa cuisse qu’il utilise comme appui pour écrire.

Prière au dieu guerrier sumérien Ninurta pour le roi d’Isin Ur-Ninurta
Prière au dieu guerrier sumérien Ninurta pour le roi d’Isin Ur-Ninurta |

Photo (C) Musée du Louvre, Dist. RMN-Grand Palais / Raphaël Chipault

L’espace de ce qu’on pourrait appeler ici « une page » ne correspond pas forcément à une feuille de papyrus, même lorsque ses dimensions sont à peu près les mêmes ; l’écriture chevauche souvent les joints (preuve, s’il en était besoin, que le scribe écrivait bien sur un rouleau déjà constitué et non d’abord sur des feuilles). Décalée par rapport à son support, la page la plus simple est ordonnée : le texte linéaire forme un pavé rectangulaire entouré de blancs, les titres ressortent en rouge.

Alignement du texte dans un rectangle (ce qu’on appellera « justification » ), marges, titres, commentaires, images..., tous ces éléments présents dès la plus haute Antiquité participent à la structuration de la page et vont évoluer selon les époques en interactivité avec les habitudes de lecture.

Mais si la page au cours de son histoire connaît une grande variété de formats et de mises en pages, sa référence demeure celle du corps : la page est ce lieu séparé où le texte est rendu accessible, manipulable.

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