Arthur Rimbaud

Une fulgurance, un météore : telles sont les métaphores couramment associées Rimbaud et à sa poésie. Non sans raison. Enfant génial et terrible, Arthur commence à tisser les mots sur les bancs de l’école, se moque en sous-main de ses professeurs, publie dès ses quinze ans ses premiers poèmes – en latin – puis s’enfuit. Arrêté, envoyé quelques temps à Douai par sa famille, il compose vingt-deux poèmes, dont le « Dormeur du Val », s’enfuit à nouveau.

Dans la guerre contre la Prusse, la France est bientôt défaite ; la capitale, occupée, vibre des accents de la Commune. Le sang du jeune homme s’échauffe. Il jette des mots sur le papier, écrit, se fait flatteur dans l’espoir de se faire publier. « Le Poète, écrit-il le 15 mai 1871, se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; il cherche lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. » Cette lettre dite « du Voyant » annonce toutes les ambitions, toutes les subversions de la poésie hallucinée que se prépare à composer Arthur Rimbaud.

À ses côtés, la figure de Verlaine apparaît fin septembre 1871. De la relation des deux poètes, on ne retient souvent que le coup de feu qui la termina précipitamment, à Bruxelles, le 10 juillet 1873. Mais cette fin tragique et les tumultes qui l’ont précédée ne doivent pas occulter deux années d’intense poésie, de blagues potaches, de fréquentation de cercles littéraires irrévérencieux. C’est à Verlaine, d’ailleurs, que Rimbaud confiera en 1875 le manuscrit de son dernier grand ouvrage, Illuminations.

Auteur maudit, qui faute d’agent ne parvient pas même à retirer les exemplaires imprimés d’Une saison en enfer, Rimbaud ose tout, se libère de tous les carcans, brise le rythme du vers, juxtapose dans ses rimes vulgaire et sublime… À l’image de Baudelaire, son modèle, il a toutes les audaces. L’aventure poétique connaît pourtant une fin précoce. À vingt-et-un ans, l’homme aux semelles de vent se fait soldat, part à Java, déserte, se rend dans la corne de l’Afrique, devient marchand d’armes. Plus un vers ne sort de sa plume, à peine quelques récits de voyage : le météore est passé, quand il commence à être découvert et publié. Revenu à Marseille en raison d'une tumeur à la jambe, amputé, Rimbaud décède le 10 novembre 1891.