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Les quatre systèmes d’écriture précolombiens

Codex de Veinte Mazorcas
Codex de Veinte Mazorcas

© Bibliothèque nationale de France

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Dans l’Amérique précolombienne, où coexistent civilisations de l’écrit et civilisations de tradition orale, seule l’Amérique centrale a vu se développer de réelles traditions d'écriture.

Plusieurs systèmes d'écriture ont existé dans l'Amérique précolombienne, mais tous partagent un élément commun : l'usage des glyphes, signes qui représentent de manière stylisée végétaux, animaux, personnages ou parties du corps.

Olmèques

L’écriture en Méso-Amérique est probablement apparue au sein de la civilisation olmèque, au début du 1er millénaire av. J.-C. D'après l'archéologue et anthropologue Caterina Magni, un premier « langage des signes » se serait développé vers 1300-1250 avant J.-C., précédant l'invention d'un système d'écriture glyphique quelques siècles plus tard.

Trois documents attestent de la naissance de cette première écriture américaine :

  • la stèle de Cascajal, découverte en 1999, dont la datation remonterait à 900 avant J.-C, mais qui fait encore débat parmi les spécialistes
  • des fragments en pierre gravés de glyphes et un sceau cylindrique provenant de San Andrés (Tabasco), datés d'environ 650 avant J.C.
  • le sceau de Tlatilco, daté entre 1250 et 800 avant J.-C.

Zapotèques

Entre 500 av. J.-C. et 800 ap. J.-C., les Zapotèques développent un système où voisinent signes chronologiques et non chronologiques. Il sert à commémorer les conquêtes, à noter le nom des souverains vainqueurs, des villes soumises, et à fixer les dates des événements relatés. Il reste cependant très méconnu, du fait du faible de nombre d'inscriptions recensées et de leur brièveté.

C'est un livre naturel car il n'a été fabriqué par personne. Le livre tourne seul ses pages. Chaque jour s'ouvre une page et si quelqu'un veut la tourner intentionnellement, il saigne parce qu'il est vivant. Mythe de l'origine du livre glyphique.

Mayas

Écriture maya
Écriture maya |

© Bibliothèque nationale de France

Disque du Chinkultic
Disque du Chinkultic |

© photo François Guénet

L’écriture maya est apparue à partir de 300 av. J.-C. À en juger par les documents que nous possédons, essentiellement des inscriptions gravées, chaque mot a d’abord été représenté par un dessin, puis le système a été complété par des signes phonétiques notant les syllabes. Cette évolution a été facilitée par le fait que la majorité des mots mayas sont monosyllabiques.

Ce qui caractérise le système maya, c’est sa polyvalence : chaque signe peut avoir plusieurs sons, et chaque son, plusieurs sens. Au milieu de l’époque classique (aux alentours du 7e siècle), l’invention du complément phonétique a permis d’indiquer la bonne lecture parmi plusieurs possibles. Cette détermination n’exclut pas la pluralité de sens pour un même son. Par exemple, il existe quatre manières d’écrire « Yax Pak », Première Aube, nom d’un chef de Copan.

Yax Pak, Première Aube, nom d’un chef de Copan
Yax Pak, Première Aube, nom d’un chef de Copan

L’écriture maya propose ainsi une lecture combinatoire qui complexifie le jeu de sons et de sens. Ce caractère ludique de l’écriture permet au sens de rester ambigu et énigmatique, comme le montrent les textes de l’époque coloniale.

En même temps que l’écriture s’est précisée pour noter l’histoire des rois, elle est aussi devenue plus flexible pour autoriser les manipulations d’ordre mythique et politique. Cette polyvalence est d’autant plus complexe qu’il est vraisemblable que l’écriture maya se lisait en plusieurs langues.

Codex de Paris
Codex de Paris |

© Bibliothèque nationale de France

Codex de Dresde
Codex de Dresde |

© Sächsische Landesbibliothek (Tous droits réservés)

Nahuas

Écriture nahuatl
Écriture nahuatl |

© Bibliothèque nationale de France

À partir du 11e siècle, la civilisation nahua, qui parle la langue nahuatl, investit le plateau mexicain. Parmi les différentes populations qui la composent prennent place les Mexica, plus connu sous le nom d'Aztèques.

Les nahus développent jusqu’à l’arrivée des Espagnols (1519-1521) une écriture pictographique dont le livre peint est le support privilégié. Des liens graphiques (lignes, pointillés, chemins, traces de pas) structurent les textes aztèques qui nous sont parvenus, reliant personnages et pictogrammes (glyphes) ; ils indiquent en même temps les ordres de lecture préférentiels d’une écriture dont les éléments se déploient avec une grande liberté.

Codex Xolotl
Codex Xolotl |

© Bibliothèque nationale de France

Le système d’écriture nahuatl est aujourd’hui encore largement indéchiffré. À mi-chemin entre la simple figuration pictographique, l’idéogramme et le symbole phonétique, l’écriture nahuatl est composée de trois éléments :

  • des personnages, facilement identifiables ;
  • des compositions symboliques (les glyphes) ;
  • des signes arbitraires, liens graphiques ou plastiques, qui relient glyphes et personnages entre eux.

Les glyphes se caractérisent par leur souplesse. Ainsi, l’élément chalchihuitl, « jade », peut prendre des aspects sensiblement différents selon le contexte dans lequel il est employé.

Chalchihuitl, « jade »
Chalchihuitl, « jade »

Pour transcrire les noms propres, notamment ceux des villes, les Aztèques ont eu recours au rébus à transfert ; par exemple, le nom Coatitlan, signifiant « près des serpents », se transcrit à l’aide du pictogramme désignant le serpent (coatl) auquel on ajoute le pictogramme « dent » (tlan), homonyme de « près de ». Au lecteur de comprendre, d’après le contexte, qu’il ne s’agit pas de la « dent du serpent » mais de la ville « près des serpents ».

L’écriture nahuatl joue sur les deux tableaux du son et du sens. Les deux possibilités d’interprétation, idéographique ou phonétique, sont offertes au lecteur.

Provenance

Cet article provient du site L’aventure des écritures (2002) et a été revu en 2024.

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