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Focus

Faire l’histoire de la lecture

« Les Censeurs » (Parisiens pittoresques)
« Les Censeurs » (Parisiens pittoresques)

© Bibliothèque nationale de France

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La lecture n’est pas un invariant anthropologique sans historicité. Les hommes et les femmes d’Occident n’ont pas toujours lu de la même façon. Quelles sont les grandes approches des historiens de la lecture ? Petit panorama…

L’histoire de la lecture a longtemps été partagée entre deux types d’approches : celles qui entendaient déplacer ou dépasser l’histoire littéraire traditionnelle ; celles qui se fondaient sur une histoire sociale des usages de l’écrit.

Rouleau manuscrit
Rouleau manuscrit |

Bibliothèque nationale de France

De nombreuses démarches ont tenté de « sortir » la lecture de l’œuvre, pour la comprendre comme une interprétation du texte qui n’est pas entièrement commandée par les agencements linguistiques et discursifs. D’un autre côté, l’histoire de la lecture a trouvé des appuis puissants dans l’histoire de l’alphabétisation et de la scolarisation, celle des normes et des compétences culturelles et celle de la diffusion et des usages de l’imprimé. Elle est apparue comme le prolongement possible, nécessaire, des études classiques qui ont dessiné, pour différents sites européens, la conjoncture de la production éditoriale, la sociologie des possesseurs de livres, la clientèle des libraires, des cabinets littéraires et des sociétés de lecture.

Entre ces deux familles d’approches, l’analyse bibliographique à la manière anglaise et américaine a proposé une possible articulation. Elle montre comment les formes du livre et les dispositions de la page affectent la construction du sens du texte. Par ailleurs, elle collecte, sur le livre lui-même, les traces de sa circulation (marques de possession, ex-libris, mentions d’achat, de don, de prêt, etc.) comme celles de sa lecture (soulignements, annotations, index personnels, textes manuscrits, etc.). En cela, elle rappelle que les textes sont toujours communiqués à leurs lecteurs dans des formes (manuscrites ou imprimées, écrites ou orales) qui les contraignent sans pour autant détruire leur liberté.

Atharvana
Atharvana |

Bibliothèque nationale de France

L’histoire de la lecture peut croiser ces diverses approches en reconnaissant les contraintes qui bornent la fréquentation des livres et la production du sens, tout en inventoriant les ressources mobilisables par la liberté du lecteur – une liberté qui est toujours inscrite à l’intérieur de dépendances multiples mais qui est à même d’ignorer, déplacer ou subvertir les dispositifs destinés à la réduire.