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Article
Brève histoire de la peinture de manuscrits en Iran
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Article
Les principaux centres de peinture en Iran
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La nature dans la peinture persane
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Album
Les œuvres poétiques dans la peinture persane
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Les textes illustrés dans la peinture persane
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Livre à feuilleter
Le Livre des rois ou Shâhnâmeh
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Trois figures de peintres persans : Behzâd, Sâdeqi et Rezâ 'Abbâssi
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Les Cinq Poèmes de Nezâmi
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Le livre de l'ascension du prophète
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Un manuscrit des Cinq Poèmes de Nezâmî
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Livre à feuilleter
Mi'raj-nameh
Brève histoire de la peinture de manuscrits en Iran

Bibliothèque nationale de France
La formation du style classique persan et son épanouissement (1360 - 1460)

La Couronne des actes mémorables
Il s'agit d'une chronique racontant l'histoire du sulanat de Dehi de 1191 à 1217.
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Après la chute des Il-Khâns (1353), une dynastie se met en place en Iran occidental et à Bagdad, les Djalâyerides (1360–1410). Ceux-ci pratiquent un mécénat très fécond. Ils commandent nombre de manuscrits à peintures, dans lesquels la mise en page se transforme, intégrant l’image dans le texte. À la même époque apparaît un nouveau style d’écriture, le nasta’liq, sans doute créé vers 1375 à Tabriz. Le nasta’liq s’adapte à merveille à la copie des textes persans, surtout de la poésie, si bien que dès 1380, il sert à calligraphier des manuscrits.

Les Curiosités des créatures et les merveilles des êtres
À droite, on voit Josué au pays des géants ; à gauche, Moïse frappant le géant Og. Le manuscrit, copié pour le sultan Ahmad Djalâyer, contient deux cent cinquante-quatre peintures et a été calligraphié en nasta'liq par Ahmad Haravi.
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Les Cinq poèmes
L'enluminure mozaffaride se caractérise par des styles nouveaux et par un format très miniaturisé, comme dans ce manuscrit copié, pour un destinataire inconnu, par Ahmad b. Hoseyn Haravi.
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Tamerlan, ayant réussi vers 1400 à réunir sous son autorité l’ensemble du plateau iranien, rassemble à sa cour savants, artistes et lettrés de tous les territoires conquis. Il en résulte une synthèse étonnante, d’abord visible dans les manuscrits réalisés vers 1415 à Ispahan et Chirâz, pour son petit-fils Eskandar. L’un des règnes les plus brillants est celui de Bâysonqor, vice-roi timouride de Hérât (1412–1434) ; son ketâbkhâneh continue après sa mort et un autre atelier est en vigueur à Samarqand. À Chirâz se développe un style provincial à la cour des vice-rois Ebrâhim et ‘Abd-ollâh, jusqu’en 1451. L’héritage de ces ateliers princiers est repris par un prince du clan des Qara-Qoyounlous, Pir Bodâq, maître de Chirâz puis de Bagdad jusqu’en 1466

Jardin de fleurs et belles pensées en vers
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L'éclat timouride face au foisonnement turkmène (1460 - 1502)
L’atelier de Hérât connaît à partir de 1460, et jusqu’en 1511, un nouveau souffle. Les sultans timourides du Khorâssân donnent à leur cour un éclat très grand. Le sultan Hoseyn Mirzâ Bayqarâ et son vizir Mir ‘Ali Chir Navâ’i sont eux-mêmes des lettrés, amateurs de poésie, protecteurs attentifs des artistes. Plusieurs enlumineurs et un peintre, Kamâl al-D'in Behzâd, dominent cette période. Behzâd introduit une nouvelle façon de représenter les sujets les plus classiques, accordant grande importance à l’expression des sentiments.

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La partie occidentale de la Perse est, jusqu’en 1501, entre les mains de princes turkmènes, les Aq-Qoyounlous, eux aussi grands amateurs de manuscrits enluminés. Moins que dans leur capitale de Tabriz, c’est surtout à Chirâz que se développe tout un art du livre, très fécond. À côté de quelques créations exubérantes, l’illustration exprime surtout l’idéal de la noblesse du temps. Scènes de chasses, de fêtes, de guerres alternent dans de nombreuses copies des grands textes de la littérature persane. Parmi ceux-ci, on trouve surtout poèmes, épopée nationale (Ferdowsi), épopée romanesque (Nezâmî, Khosrow), ainsi que toutes les œuvres constituant le patrimoine littéraire commun à l’aristocratie de la Perse.

Les Huit Paradis
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Il faut éviter, malgré les différences de style, de mettre en opposition l’art des cours aq-qoyounlou et timouride, car des échanges incessants sont en cours entre Hérât, Tabriz et Chirâz.

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Un héritage partagé (1502 - 1545)
Les ateliers de Chirâz continuent leur activité après la prise de la ville par les Safavides, et manifestent une remarquable vitalité. Les Safavides avaient pris Tabriz en 1501 et devinrent rapidement les maîtres de toute la Perse, jusqu’à Hérât, qu’ils disputeront durant de longues années aux sultans ouzbeks. Les Safavides sont chiites et imposent le chiisme à tous leurs sujets musulmans, ils s’opposent ainsi aux Ottomans, aux Ouzbeks et aux Timourides qui, eux, sont sunnites.

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Deux feuillets d'un manuscrit à peintures montés dans un album
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Dans leur capitale de Tabriz, les premiers Safavides et surtout Châh Tahmâsb, grand amateur de peinture, font réaliser de beaux manuscrits et encouragent les artistes. Ils ont hérité de la tradition aq-qoyounlou et, après 1525, de celle de Hérât dont le peintre Behzâd est la figure de proue. Tabriz, centre très brillant dans le domaine du livre, reste capitale jusqu’en 1548 mais l’État ouzbek des Chaybânides, constitué autour de Samarqand à partir de 1500, possédait lui aussi une semblable tradition locale.

Combat de lutteurs
Cette luxueuse copie du Golestân a été achevée par le calligraphe Mir ‘Ali al-Kâteb (placé sous la direction de Soltân Mirak Monshi) dans le ketabkhâneh du sultan Mozzafar ad-Dîn en juillet 1543, à Boukhara. Datée de 1554, soit onze ans plus tard, cette miniature illustre l’histoire du vieux lutteur qui terrasse sans effort son jeune et présomptueux rival, qui est aussi son disciple. Le personnage qui trône au centre de l’image pourrait être le Chaybanide Yâr-Mohammad, sultan de Boukhara, si l’on en croit la date inscrite sur le linteau de la porte entrouverte sur le jardin. Sur un fond d’or qui s’oppose au bleu du ciel, deux arbres fleuris aux branches recourbées et un platane au feuillage jaune et orangé symbolisent une nature que le peintre invite à contempler, élément essentiel de l’art et image mythique du paradis.
© Bibliothèque nationale de France
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L’évanouissement du cheikh San’ân apercevant la chrétienne
Cette copie de la traduction versifiée en turc oriental du très fameux Colloque des oiseaux du poète et mystique persan Farid al-Din ’Attar (1145-1221) qu’avait réalisée à Hérat le célèbre vizir et poète Mir ’Ali Shir Navâ’î, la dédiant au sultan timouride Hoseyn Mirzâ Bâyqarâ, monte que l’œuvre était connue et estimée dans le sultanat chaybânide. Commençant par un sarlowh de frontispice finement enluminé au folio 1v, ce manuscrit comporte six peintures dont aucune n’est signée. Celle du folio 20, d’un format plus grand que celui des suivantes, représente l’évanouissement du cheikh San’ân, un vieillard réputé pour sa sainteté, lorsqu’il découvre le visage de la belle chrétienne jusque-là masqué par un voile. Ses disciples sont frappés de stupeur et le feu qui brûle dans la salle évoque le feu qui vient d’embraser le cœur du saint homme. L’architecture du bâtiment rappelle celle des palais de Boukhara au 16Ie siècle. Sur la frise supérieure de faïence bleue figure une inscription indiquant la date et le lieu de réalisation de la peinture. Un peu au-dessus dans un cadre doré, on peut lire ce distique persan : « Parfois je suis retiré au couvent et parfois je demeure à la mosquée, c’est à dire que je te cherche de maison en maison. » Ces vers n’appartiennent pas au poème persan de ’Attar, peut-être sont-ils un emprunt à un autre poème évoquant l’aventure du cheikh San’ân, ou bien l’œuvre de l’enlumineur. En tous cas, ce dernier fait preuve d’un certain raffinement en introduisant un distique persan dans l’illustration d’un poème turc. Il est vrai que si le turc était parlé à Boukhara, le persan était familier à tous les membres de la cour des Ouzbeks, souvent eux-mêmes originaires du Khorâssân.
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Après 1530, une partie de la tradition timouride de Hérât est reprise par les artistes de la cour de Boukhara et donne lieu à la réalisation de très beaux manuscrits, fidèles répliques de leurs modèles.

Le poète Sa’di en compagnie du sultan
Reprenant les vers dont l’enseignement moral est le plus significatif, l’anthologie tirée du Bustân de Sa’di a été copiée à Boukhara par le calligraphe attitré des sultans chaybanides, connu sous le nom de Mir Kalangi al-Nasafi. La seule enluminure du volume représente une scène de dédicace. Dans la cour d’un palais s’ouvrant sur un jardin, assis sur un tapis, un prince reçoit un cheikh, le poète Sa’di lui-même. À leurs côtés sont agenouillés deux derviches, dans l’attitude humble des soufis. Les hommes de la suite du sultan sont représentés sur l’autre page ; l’un d’entre eux porte son carquois et ses flèches. Calligraphiés dans des bandeaux, des vers du grand poète Hâfez chantent les bienfaits que l’on peut retirer de la fréquentation des derviches. Comme c’est l’usage, les vêtements sont peints avec des couleurs vives, employées pures.
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De son côté, l’empereur Homâyoun constitue à Kaboul un premier atelier, qui constitue l’embryon des ateliers moghols d’Inde, et rassemble des artistes de Hérât et de Tabriz. La cour ottomane d’Istanbul accueille également plusieurs artistes venus de Perse. Le style persan est fort estimé des bibliophiles.
La cour persane à Qazvin : une période de transition (1545 - 1600)
Après 1545, l’atelier de la cour safavide perd de l’importance et les commandes royales sont moins nombreuses. La capitale persane est alors établie à Qazvin. En l’absence de mécénat royal, certains des manuscrits à peintures réalisés à Qazvin tendent facilement vers un art semi-populaire.

Reliure persane laquée à décor animalier
La reliure de ce manuscrit, réalisée aussi à Qazvin vers 1550 ou 1560, est de quelques années postérieure à la copie du manuscrit.
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Reliure d’un recueil de poèmes représentant un prince assis dans un jardin lors d’une fête
Bel exemple de l’art de la laque au milieu du 16e siècle, cette peinture n’a aucun rapport direct avec le contenu du manuscrit, un choix de vers des poètes Khosrow Dehlevi et Djâmi. La figure du prince évoque celle de Châh Tahmâsb, mais pourrait aussi bien représenter Ebrâhim Mirzâ ou un autre prince safavide. Faites à partir de papier mâché peint, les reliures laquées ornaient les manuscrits de grand luxe.
© Bibliothèque nationale de France
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En revanche, Ebrâhim Mirzâ, prince et gouverneur du Khorâssân de 1556 à 1565, fait de cette province, dont la ville principale est Machhad, un centre important, où se retrouvent calligraphes, peintres et relieurs. Plusieurs manuscrits se rattachent à son atelier. La constitution d’albums où alternent calligraphies et peintures isolées est encouragée par des théories qui associent l’esthétique de ces deux arts. À partir du milieu du XVIe siècle, ces albums sont de plus en plus en vogue et supplantent un peu les copies des grands textes de la littérature persane.

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Au Khorâssân, à partir de 1560, se développe, dans le sillage des ateliers de Machhad, un style assez original. Les manuscrits réalisés au Khorâssân dans le dernier tiers du XVIe siècle sont nombreux, et semblent avoir été fort recherchés des bibliophiles.
Le rayonnement international de Chirâz (1545 - 1620)
Entre 1545 et 1620, après le déclin de l’atelier royal safavide et le changement de capitale, le nombre de manuscrits enluminés réalisés à Chirâz est considérable. Les ateliers de Chirâz continuent sur plus d’un point l’art de la cour de Tabriz sous Châh Tahmâsb, en même temps que la tradition locale. À côté de quelques commandes princières, il s’agit le plus souvent d’une production commerciale destinée à un vaste public aristocratique ou lettré, bien souvent au-delà des frontières de la Perse safavide.

Bahrâm Gûr V terrassant les deux lions
Le jeune prince Bahrâm est envoyé par son père Yazdagird, souverain d’Iran, à la cour des princes arabes afin de parfaire son éducation. À la mort de son père, les nobles iraniens refusent de le reconnaître comme roi et c’est l’un d’entre eux, Khusraw, lui aussi d’origine royale, qui est proclamé roi. Bahrâm, à la tête de ses troupes, envahit alors l’Iran et propose une épreuve pour décider de la succession royal e : celui qui attrapera la couronne placée sur le trône gardé par deux lions deviendra le souverain légitime. Vu son grand âge, Khusraw s’y refuse et Bahrâm tue les deux fauves. S’asseyant sur le trône, il pose la couronne sur sa tête et est reconnu comme le souverain légitime.
La composition symétrique de la page facilite largement la compréhension. L’objet de convoitise, le trône vide, occupe la partie centrale. Sa forme hexagonale est signe de souveraineté. Sur le siège est posée la couronne, près d’un coussin. Derrière, dans un parfait demi-cercle, se tient l’assistance qui attend le dénouement. Aux turbans blancs parfaitement alignés, répondent les épées accrochées en travers des corps. La diversité des positions corporelles, les visages de face ou de profil, rompent la monotonie de la ligne. Juste devant, plusieurs personnages sont aux premières loges. Au premier plan enfin, Bahrâm Gûr, qui vient de maîtriser le premier lion gisant ensanglanté à droite, assène un coup de massue au second
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Fuite de Farruh
« Vaincu par Tamerlan, le gouverneur de Bagdad s'enfuit sur le Tigre »
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Calligraphie et illustration ont parfois un caractère plus stéréotypé, mais les manuscrits sont objets d’un très riche programme d’enluminures comprenant souvent un très grand nombre de peintures. L’illustration met en scène de nombreux personnages qui semblent comme les acteurs d’un théâtre. Le décor est constitué de paysages aux éléments souvent interchangeables ou d’architectures fortes chargées en motifs décoratifs.

Siège de Hamadân (1221)
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L’évolution artistique que l’on observe à Qazvin laisse transparaître ses effets dès 1575 à Chirâz. Certains manuscrits ont été commandés à Chirâz par des souverains comme les sultans de Golconde au Deccan
Les ateliers de Chirâz sont encore florissants lorsqu’Emâm-Qoli Khân est gouverneur, puis ils cessent leur activité après 1630, au profit de ceux de la capitale. Chirâz est un centre important de production de manuscrits enluminés, sans être capitale politique du royaume.

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Fête donnée par un prince
Cette peinture, la seule de ce manuscrit, est sans rapport direct avec son contenu, ce qui est une façon assez habituelle de marquer le début d’un manuscrit poétique de luxe. Elle évoque une fête donnée par un jeune prince, représenté en train d’offrir une coupe à sa bien-aimée. Peut-être s’agit-il du vice-roi de Fârs le protecteur de Sa’di ; le poète se trouverait alors parmi les assistants de ce banquet.
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Provenance
Cet article provient du site Splendeurs persanes, 1999.
Lien permanent
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