Henri Moser

Prise en Suisse, peut-être en extérieur, sur l’herbe, cette photographie pourrait se résumer en deux mots : prestance et exotisme. Portant la main à l’épée comme sur les meilleurs portraits de Van Dyck, Henri Moser, qui a alors un peu moins de quarante ans, revêt un costume qui semble en partie de fantaisie : une toque de laine blanche, un long manteau fourré, et un ensemble en cuir agrémenté de hautes bottes. Si la partie supérieure est coupée à l’européenne et laisse apercevoir le col d’une chemise, les motifs du pantalon bouffant évoquent les productions de l’Asie Centrale, qu’Henri Moser a parcourue à quatre reprises, seul ou dans des expéditions militaires. S’ajoute à l’ensemble une débauche d’accessoires : cravache russe dans une main, sabre persan dans l’autre, deux ceintures, l’une de tissu, l’autre de cuir, qui retiennent un poignard, et enfin un pistolet dans une gaine ornée. Autant d’éléments qui rappellent la passion d’Henri Moser pour la collection, notamment des armes « orientales ».

Né à Saint-Pétersbourg mais élevé en Suisse, Henri Moser est l’un des témoins et des acteurs du Grand Jeu, ce conflit larvé qui met aux prises Russie et Grande-Bretagne pour la domination de territoires stratégiques au cœur de l’Asie. Officier, il prend fait et cause pour l’empire du tsar, mais part aussi, solitaire, à l’aventure et à la chasse. Moser se situe ainsi entre le voyageur amateur et l’explorateur militaire. Sans réaliser de découvertes majeures, il retrace ses impressions dans des récits de voyage, et entame, à partir de 1890, une carrière diplomatique pour le compte de l’empire austro-hongrois.