Carte de l'Île Lincoln

Inspiré par les aventures de Robinson Crusoé, qui naissent de la plume de Daniel Defoe en 1719, Jules Verne publie en 1874 L’île Mystérieuse.

En pleine guerre de Sécession, un groupe de cinq confédérés s’échappent en ballon d’un camp sudiste : l’ingénieur Cyrus Smith, son domestique Nab, le journaliste Gédéon Spilett, le marin Pencroff et l’adolescent Harbert. Pris dans une tempête, ils échouent sur une île perdue au milieu du Pacifique sud sur laquelle ils vont créer une petite société fraternelle grâce à l’aide du capitaine Nemo. Très vite, ils choisissent de se considérer non plus comme des « naufragés » mais comme des « colons », qui vont faire de l’île une nouvelle Amérique, d’où son nom : l’île Lincoln.

« — Quant à moi, dit le marin, que je perde mon nom si je boude à la besogne, et si vous le voulez bien, monsieur Smith, nous ferons de cette île une petite Amérique ! Nous y bâtirons des villes, nous y établirons des chemins de fer, nous y installerons des télégraphes, et un beau jour, quand elle sera bien transformée, bien aménagée, bien civilisée, nous irons l’offrir au gouvernement de l’Union ! Seulement, je demande une chose.
— Laquelle ? répondit le reporter.
— C’est de ne plus nous considérer comme des naufragés, mais bien comme des colons qui sont venus ici pour coloniser ! »

Avec une grande habileté, Jules Verne mêle la somme des connaissances scientifiques de son époque et la fiction. Sous le nom de l’île donné en référence au président américain Abraham Lincoln, les coordonnées situent avec précision ce morceau de terre perdu en pleines mers du sud. Tout concourt à donner chair et substance à la fiction : la précision du rendu cartographique — linéaments du rivage, frondaisons, reliefs, etc. L’auteur, en donnant à son île la forme d’un squale ouvrant grand sa mâchoire, indique en même temps au lecteur toute la menace que représente ce territoire borné par les flots pour les hommes qui viennent de s’y échouer.