Les Contes de Perrault

Aux dires de Pierre-Jules Hetzel, qui préface le livre sous le pseudonyme de P.-J. Stahl, l’édition des Contes de Perrault illustrée par Gustave Doré serait née de la volonté de l’artiste, désireux d’offrir un pendant au sombre Enfer de Dante, qu’il venait tout juste d’illustrer pour Hachette, faisant ainsi contraster « d’un côté, le merveilleux dans ce qu’il a de plus funèbre, de plus tragique et de plus ardu ; de l’autre, le merveilleux divertissant, spirituel, émouvant jusque dans le comique et comique jusque dans l’émouvant, le merveilleux à son berceau ». À la croisée du livre d’amateur luxueux et de la littérature pour la jeunesse, le projet de Gustave Doré a de quoi séduire l’éditeur, ardent défenseur des contes de fées, dont il plaide la cause dans sa longue préface de vingt pages truffée d’anecdotes démontrant par le bon sens que, si le merveilleux ne fait pas de bien, du moins ne fait-il pas de mal. Illustré de quarante compositions magistrales de Doré gravées sur bois et opérant comme des tableaux, ce grand volume in-folio publié en novembre 1861 à l’approche des étrennes se veut un « monument, élevé à la gloire de Perrault et au profit de ses admirateurs de tous les âges ». Pour ce faire, l’éditeur n’a pas regardé à la dépense : grand format, papier spécial du Marais, belle typographie, recours à onze graveurs parmi les plus talentueux, dont Pannemaker et Pisan, riche cartonnage à décor doré en relation avec le texte. Et l’éditeur de revendiquer « cette énormité apparente, un très grand livre, très cher, pour les petits enfants » que Sainte-Beuve qualifiera, fort justement d’ « étrennes de roi ». (C. P.)