La Nativité

Ce manuscrit n’a rejoint le corpus du Maître du Livre de prières de Dresde que récemment. De par sa taille, il peut être rangé parmi un groupe de petits livres d’heures, rassemblés par Bodo Brinkmann, comprenant le manuscrit éponyme de l’artiste (Dresde, SLUB, ms. A. 311) ainsi qu’un livre d’heures de New York (PML, ms. M. 1077). Les feuilles d’acanthes décorant les bordures marginales ne sont pas sans rappeler celles des deux livres précités. Le Livre de prières de Dresde, comme le manuscrit de Paris, est illustré d’animaux tant réels que fantaisistes, à l’inverse des Heures de New York. La dimension de ces folios (environ 100 × 70 mm) et la justification (environ 50 × 35 mm) rapprochent le manuscrit de Paris des Heures de Major Abbey, également attribuées au Maître du Livre de prières de Dresde (collection privée).
Le livre d’heures de l’Arsenal n’affiche malheureusement aucune marque du premier possesseur. Un écu blanc sur une tombe, ainsi qu’un autre tenu par un ange (fol. 130v.) n’ont peut être qu’un rôle décoratif. Une anomalie flagrante peut être observée dans le calendrier : chaque mois ne dispose que de trente entrées. Le problème se pose de façon manifeste pour le dernier jour de l’année, la Saint-Sylvestre. Le pape Sylvestre est donc mentionné le 30 et non le 31 du mois. Le calendrier comprend d’autres erreurs. Par exemple l’Octave de sainte Agnès, la seconde célébration, mentionnée Agnetis secundo, devrait figurer le 28 janvier et non le 29 ; Marcellini pape le 26 avril et non le 27 et Johannis pape le 27 mai et non le 28. Sainte Julienne de Nicomédie est fêtée le 16 février et non le 16 mars ; on trouve l’Assomption de Marie à la fois le 10 et le 15 août, cette dernière mention ayant dû être intercalée entre deux autres quand le copiste s’est rendu compte de son erreur. Il a ainsi involontairement créé le seul mois à trente et une entrées. Enfin, une lettre A en or a été omise le 9 avril.
Le premier feuillet de chaque mois du calendrier est orné d’une bordure entièrement décorée, comportant au bas du folio un médaillon illustrant les occupations des mois. À droite de la zone écrite, un autre laisse apparaître, sur fond noir, le signe zodiacal correspondant. Une double ligne pourpre encadre les décors marginaux du calendrier. On la retrouve autour des bordures marginales des feuillets contenant des initiales historiées et des scènes de petit format. Celles-ci, au nombre de trente-quatre, occupent une hauteur de huit et parfois de sept lignes.
Les douze grandes miniatures de ce manuscrit présentent les caractéristiques propres au Maître du Livre de prières de Dresde. On reconnaît ainsi, dans la scène de l’Adoration des Mages, l’utilisation du noir dans le vêtement de la Vierge, le surcot du roi agenouillé, l’ensemble des cadeaux offerts à l’Enfant et la charpente de l’étable. Sont également remarquables l’exécution des tissus blancs et notamment l’attention apportée à la robe du roi mage, que l’on retrouve dans les enluminures du livre d’heures de New York mentionné ci-dessus, où tous les personnages – mis à part les pleurants au cimetière – sont exceptionnellement habillés de blanc. On retrouve enfin un usage généreux des rehauts dorés, en particulier sur la draperie, ainsi que les joues roses et luisantes et les lèvres menues des figurants.
Les traces de la disparition d’un folio, dont subsistent les bords déchirés, sont clairement visibles juste avant le début de l’Office de la Vierge pendant l’Avent (fol. 100). Bien qu’aucun témoin ne subsiste, un autre feuillet manque probablement à l’entame des heures de la Vierge (fol. 36), débutant avec les matines, qui devraient, selon l’habitude, comporter une Annonciation en vis-à-vis. Entre sexte et vêpres, on constate également l’absence du texte de none et d’une miniature à pleine page, probablement une Présentation au Temple, qui devrait l’accompagner. Les illustrations à pleine page des heures de la Vierge dans ce manuscrit comprennent la Visitation, la Nativité, l’Annonce aux bergers, l’Adoration des Mages, le Massacre des Innocents et la Fuite en Égypte. Les autres miniatures à pleine page représentent la Déploration au pied de la croix, la Pentecôte, la Vierge à l’Enfant, David en prière, un corps sur une tombe et saint Jérôme.