Le Compositeur Cherubini et la Muse de la poésie lyrique

Ce tableau fut peint par Ingres en plusieurs étapes, entre 1834, année où le peintre commence un simple portrait de Pier-Luigi Cherubini (1760-1842), et 1842, date à laquelle il montre la toile finie à Paris : une allégorie figurant le compositeur et la muse Terpsichore. Cherubini était considéré dans les années 1830 comme l'un des plus grands compositeurs vivants : Ingres, qui était également un musicien de talent, voyait en lui un lien entre Mozart et Beethoven. La Restauration avait fait de Cherubini un pilier de la vie musicale, en le nommant avec Le Sueur surintendant de la Chapelle royale, et, depuis 1822, il était directeur du Conservatoire (alors École royale de musique et de déclamation). Ingres et lui se sentaient sans aucun doute des points communs dans leur amour du classicisme et leur méfiance vis-à-vis de l'esthétique romantique. Si Berlioz connut peu Ingres, ses premiers pas dans la musique parisienne l'amenèrent évidemment à rencontrer le directeur du Conservatoire, qui était aussi membre de la section musicale de l'Institut et faisait donc partie des jurys pour le prix de Rome : il s'ensuivit une longue relation, faite du côté de Berlioz d'admiration pour le compositeur, mais aussi de dérision pour les ridicules de l'homme de pouvoir qui mit à plusieurs reprises des obstacles à sa carrière comme le rapportent les Mémoires. Ami de Cherubini, Ingres n'aida pas non plus Berlioz : il ne soutint pas les différentes candidatures du compositeur à l'Institut, dont il faisait partie. En 1857, pourtant, il était présent avec d'autres membres de l'Institut pour la lecture que Berlioz donna de son poème des Troyens chez Hittorff.