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Focus

L'effet des Méditations poétiques : l'avis des contemporains

Les Méditations dans la presse

Une poésie nouvelle et chrétienne

« M. de la Martin est énergique et profond parce qu'il est vrai ; il est pathétique et touchant parce qu'il est touché lui-même ; il rend sensible cette vérité si bien énoncée par Vauvenargues, que les grandes pensées viennent du cœur. [...]
Un aurte avantage pour M. de la Martine, c'est d'avoir été le premier, en France, qui ait osé transporter ces hautes méditations dans le domaine de la poésie lyrique ; il s'est créé par là un genre tout-à-fait nouveau pour nous. [...] Après les chants sacrés de Racine et de J. B. Rousseau, empruntés à l'Écriture sainte, c'est encore une chose tout à fait nouvelle que ces méditations sur l'existence de Dieu, sur sa providence, sur l'immortalité, sur le néant et la grandeur de l'homme, sur le grand problème du bien et du mal, où le poète, sans s'appuyer de l'autorité des livres saints, sans se dissimuler les objections d'une raison indocile ou rebelle, trouve dans son propre cœur, déchir par les pertes les plus sensibles, des motifs de croire, de se soumettre et d'adorer. »

M. Vanderbourg, Journal des Savants, 1820, p. 601-606 (sur Gallica).

Un accueil chaleureux

« De toutes les renommées qui s'élèvent dans notre époque, celle de M. de Lamartine est peut-être la seule qui ait atteint du premier bond toute sa hauteur. [...] Les belles élégies de M. de Lamartine ont obtenu tout le succès qu'elles ont mérité, et mérité tout le succès qu'elles ont obtenu. Félicitons-en ce jeune poète, et pour nous et pour lui. L'originalité de ses couleurs, le charme de sa poésie, la mélancolie profonde empreinte dans l'ensemble de ses ouvrages, assignent à l'auteur des Méditations une des places les plus élevées parmi nos poètes. »

Le Réveil, 7 décembre 1722, p. 2 (sur Gallica).

Un peu trop romantique ?

« Les productions poétiques de M. de Lamartine ne sont point de ces objets qui naissent sans éclat, sans réputation, et qui disparaissent après avoir parcouru, sans succès, le monde littéraire ; elles sont recommandées aux hommes éclairés par l'intérêt toujours croissant qu'elles inspirent ; en les relisant, on éprouve de nouvelles sensations. La grâce, l'élégance et l'harmonie les caractérisent ; la vérité, le goût et la raison en ont dicté plusieurs pages ; la clarté domine dans les idées, et la lucidité dans les expressions ; en un mot, leur mérite assigne à M. de Lamartine une place distinguée parmi les poètes modernes. Où trouver, mieux que dans les méditations de ce nourrisson des musées, ce luxe de versification, et cet heureux mécanisme des vers ? Nourri des beautés mâles de l'antiquité et de la lecture des auteurs étrangers, il s'en est montré prodigue dans son précieux recueil. [...] Le mérite inappréciable d'un style pur et soutenu, ne doit pas être contesté à M. de Lamartine, seulement l'homme de goût peut lui reprocher quelques néologismes, un peu trop de monotonie dans sa marche, et de négligence dans quelques expressions. Les mêmes défauts et les mêmes qualités se trouvent aussi dans les épîtres qu'il vient tout récemment de publier ; il y parle souvent, trop peut-être, le langage romantique, langage qui plaît un instant, mais qui, répété, blesse l'oreille du sensible mélomane [...]. »

Lazare S., Le Véridique, 31 octobre 1825, p. 2 (sur Gallica).

Une poésie pieuse, loin de l'anarchie révolutionnaire

« D’où vient le succès de l’auteur des Méditations poétiques ? C’est que ce jeune poète, chantant pour une nation échappée à peine aux horreurs de l’anarchie, aux ténèbres de l’ignorance, aux crimes de l’impiété, répandit dans ses vers la tristesse mélancolique de la France renaissante, et cette philosophie religieuse, véritable caractère de la génération qui s’élève. »

M. Delcasso, « Coup d'œil sur l'état actuel de la littrature en France », Journal de la Société des sciences, agriculture et arts du département du Bas-Rhin, tome 5, 1828, p. 135 (sur Gallica).

L'avis des écrivains

Charles Nodier : la renaissance de la poésie

« Quand les Méditations poétiques furent publiées pour la première fois, les vers étaient tombés dans un tel discrédit que les libraires n’en voulaient plus, et l’on semblait convenir généralement qu’une prose cadencée, nombreuse et noble, était le seul langage qui pût s’approprier avec succès aux conceptions de la nouvelle école. L’effet des Méditations résulta donc d’une opération soudaine qui se fit dans l’esprit des lecteurs, et qui devait nécessairement produire l’harmonie de ces sentiments que tout le monde avait éprouvés, avec cette belle langue dont tout le monde avait senti le besoin. »

Le Propagateur, 1823 (sur Gallica), repris dans la préface à la onzième édition des Méditations poétiques, 1824.

Charles-Augustin Sainte-Beuve : l'élévation du vers

« Non, ceux qui n’en ont pas été témoins ne sauraient s’imaginer l’impression vraie, légitime, ineffaçable que les contemporains ont reçue des premières Méditations de Lamartine, au moment où elles parurent en 1819 [sic]. On passait subitement d’une Poésie sèche, maigre, pauvre, ayant de temps en temps un petit souffle à peine, à une Poésie large, vraiment intérieure, abondante, élevée et toute divine. »

Lettre à Paul Verlaine du 19 septembre 1865, Correspondance générale, éd. Jean Bonnerot, t. XIV, Didier, 1964, p. 446.