La reprise en main des monnayages baronnaux par le roi de France : une ordonnance de Louis X le Hutin

Louis par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre etc., au bailli¹ de Mâcon salut. Nous avons entendu la grande complainte de notre peuple du royaume de France qui nous a montré que, à cause des monnaies faites hors de notre royaume et contrefaites à nos coins et aux coins de nos barons, à cause aussi des monnaies de nosdits barons qui ne sont pas toutes du poids, de la loi ou du type ancien et convenable, nos sujets et notre peuple sont lésés en beaucoup de façons et souvent grandement trompés et le seraient encore davantage si cela était plus longtemps supporté. Pour cela, Nous, qui voulons toujours préserver des dommages notre peuple et nos sujets, et écarter toute occasion d'exaction et de tromperie, ordonnons et avons ordonné et établi qu'aucune monnaie noire² forgée hors de notre royaume de quelque coin qu'elle soit, qu'aucune autre monnaie d'or et d'argent contrefaite ne soit prise, mise en circulation ou allouée en notre royaume, par aucun de nos sujets ou une autre personne, cela à aucun prix. Nous voulons que lesdites monnaies de nosdits barons n'aient pas cours en notre terre ni en la terre d'un autre baron sauf seulement dans les lieux où elles ont cours de grande ancienneté et ce pour leur droit cours. C'est pourquoi nous te mandons et commandons que tu fasses crier solennellement cette ordonnance, que tu la fasses publier dans ton bailliage, dans son ressort et en tous ses lieux, là où tu verras qu'il sera nécessaire de le faire. Et toutes lesdites monnaies que l'on trouvera en circulation contre notre défense, et non pas autrement, nous voulons qu'elles soient saisies et aussitôt percées et rendues toutes percées à ceux à qui elles auront été prises. Et si quelque changeur ou orfèvre, qui doit connaître lesdites monnaies défendues, était trouvé donnant ou acceptant ces monnaies défendues, nous voulons qu'elles soient prises comme forfaites et qu'elles nous soient remises. Donné à Paris le dix-neuvième jour de novembre, l'an de grâce 1315.

<sub>1. Bailli : à partir du 13^e siècle, officier exerçant au nom du roi de France des fonctions judiciaires, financières et militaires dans une vaste circonscription (le bailliage).
2. Monnaie noire : monnaie de faible valeur, dont l'alliage comporte peu de métal précieux.</sub>