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Extrait

Amilcare Anguissola demande à Michel-Ange de soutenir sa fille Sofonisba

Lettres du 7 mai 1557 et du 15 mai 1558
Ces deux lettres qu'Amilcare Anguissola, père de Sofonisba, adresse à Michel-Ange pour lui recommander sa fille témoigne de l'insertion de cette dernière dans les réseaux artistiques de la Renaissance.

Lettre datée de Crémone, le 7 mai 1557

Mon très honorable seigneur

Votre âme bienveillante, très excellente et vertueuse (toutes choses qui sont des dons de Dieu) m’a laissé de vous le souvenir qui revient de droit à un gentilhomme aussi extraordinaire. Et ce qui me rend, moi et toute ma famille, votre très humble obligé, est d’avoir compris l’affection honorable et sincère que vous portez à Sofonisba, ma fille, que vous avez initiée à l’art très honorable de la peinture. Je vous assure que je suis plus reconnaissant pour la faveur que je reçois de votre très honorable affection que pour toutes les richesses qu’un prince pourrait dispenser, car je me trouve très obligé pour les actions généreuses et vertueuses que vous nous avez prêtées, à Antonio Anselmi et moi-même […]. Je vous demande donc, puisque par le passé vous avez été assez bon, avec votre gracieuse courtoisie, pour parler à ma fille et l’encourager, de daigner à l’avenir partager votre divine pensée avec elle. Je vous assure que lorsqu’elle saura l’ineffable faveur que vous lui accordez, son esprit s’orientera, je l’espère, vers les meilleurs résultats. Nous ne saurions recevoir les effets de votre bonté avec plus de bonheur et de fierté. En particulier si vous êtes assez bon pour lui envoyer un dessin pour qu’elle puisse le peindre à l’huile, en lui demandant de le renvoyer dûment achevé de sa propre main. En pareil cas, pour compenser ma dette envers vous, je ferais de ma fille, Sofonisba, qui représente ce que j’ai de plus cher au monde, votre humble servante. Crémone, le 7 mai 1557.

Votre très obéissant serviteur,
Amilcare Anguissola

Lettre datée de Crémone, le 15 mai 1558

Très magnifique et honorable Michel Ange,

Vos lettres amicales me sont beaucoup plus chères que celles que je pourrais recevoir de notre roi [Philippe II]. Je vous assure que parmi les nombreuses obligations que j’ai envers Dieu, figure celle de savoir qu’un gentilhomme si éminent et si talentueux – plus que tout être au monde – a été assez bon pour examiner, juger et louer les peintures exécutées par ma fille Sofonisba. J’espère que Dieu, en sa divine majesté, lui permettra à elle qui peint si vertueusement, de vivre avec mes autres filles et mon fils afin que nous puissions tous nous voir et plus tard nous réjouir au paradis, ce en quoi je place tous mes espoirs. Et avec cette foi, d’abord en mon nom, ensuite pour toute ma famille, je vous salue et vous adresse nos compliments. Crémone, le 15 mai 1558.

Votre ami et serviteur très affectionné,
Amilcare Anguissola

Lettres conservées premièrement à la Biblioteca Medicea Laurenziana à Florence. Citées dans Ilya Perlingieri, Sofonisba Anguissola, femme peintre de la Renaissance, Paris : E. Lévy, 1992.
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