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Extrait

Les quatre fous de Cromwell
 

Victor Hugo, Cromwell.
Texte intégral : Paris, Albin Michel, 1880-1926
 
Les deux premières scènes de l’acte IV réunissent Cromwell et ses quatre bouffons. La chanson du premier, Élespuru (prononcer Élespourou), est le seul passage de la pièce qui peut rivaliser avec sa préface pour la notoriété : Vigny s’en disait « fou comme le prétendu fou », et Victor Hugo la reprendra intégralement en 1826 pour servir d’épigraphe à sa ballade «  À un passant ».
 

CROMWELL, après un moment de silence. Oui, je veille, – et pour tous !

Cromwell, qu’à cette place un soin prudent transporte,

Veut à ses assassins lui-même ouvrir sa porte.

On entend un bruit de pas et de voix dans l’éloignement.

Déjà ? – Mais non, minuit n’a point encor sonné.

C’est un passant.

On distingue comme un chant inarticulé.

Des chants ! le drôle a mal jeûné !

La voix s’approche, et l’on entend chanter sur un air monotone les paroles suivantes :

Au soleil couchant,

Toi qui va cherchant

Fortune,

Prends garde de choir ;

La terre, le soir,

Est brune.

 

L’océan trompeur

Couvre de vapeur

La dune.

Vois ; à l’horizon

Aucune maison,

Aucune !

 

Maint voleur te suit ;

La chose est, la nuit,

Commune.

Les dames des bois

Nous gardent parfois

Rancune.

 

Elles vont errer.

Crains d’en rencontrer

Quelqu’une.

Les lutins de l’air

Vont danser au clair

De lune.

La voix s’approche de plus en plus et se tait.

CROMWELL. Bon ! c’est un de mes fous qui chante ; – Élespuru,

Je crois.

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