Victor Hugo, l'incarnation du siècle
 

Le 25 février 1830, la foule se presse pour assister à la première d’Hernani, drame romantique de Victor Hugo joué à la Comédie-Française. Entre applaudissements des romantiques et huées des classiques, le vacarme est tel que cette représentation a été qualifiée de « bataille ». Pressentant un accueil hostile, Hugo avait enjoint à ses amis écrivains et peintres de venir faire la claque lors de la première.
Chef de file des romantiques, Victor Hugo avait fait la lecture d’Hernani au salon de l’Arsenal de Nodier et dans son propre cénacle, rue Notre-Dame-des-Champs.

La longue préface de Cromwell est considérée comme le manifeste du romantisme. C’est une attaque en règle d’une efficacité redoutable contre le théâtre classique et néo-classique, qui régnait alors sur les scènes françaises. Art poétique, la préface développe trois idées principales : la liberté dans l’art, la revendication du grotesque, l’autonomie du génie.

Le roman de Victor Hugo Notre-Dame de Paris, publié en mars 1831, est un succès populaire. Dans le Paris médiéval du 15^e siècle, Notre-Dame de Paris raconte l’histoire de la Esméralda, une bohémienne accusée de meurtre et du bossu Quasimodo, sonneur des cloches de Notre-Dame. Amoureux d’Esméralda, il tentera de la sauver du gibet. Autour d’eux gravitent le tuteur de Quasimodo, Claude Frollo, archidiacre de Notre-Dame, et un poète, Pierre Gringoire, qui se retrouvera malgré lui dans la légendaire Cour des Miracles. L’histoire, qualifiée par la critique d’immorale et d’anticléricale, est adaptée au théâtre et à l’opéra, déclinée en estampes, tableaux, vaisselles… Souvent les adaptations sont moins tragiques que le roman lui-même.
Le roman participe également à la prise de conscience de la nécessité de préserver et de restaurer le patrimoine architectural de Paris.

Ruy Blas est écrit du 8 juillet au 11 août 1838 pour l’inauguration du Théâtre de la Renaissance que Victor Hugo vient de créer avec Alexandre Dumas et l’appui du Duc d’Orléans. Victor Hugo dessine les décors, choisit les acteurs et assiste aux répétitions. La pièce est représentée pour la première fois le 8 novembre 1838. Elle est publiée la même année chez Delloye.

Le 2 décembre 1851, le président de la République Louis-Napoléon Bonaparte organise un coup d’État afin de garder le pouvoir, alors que son mandat de quatre ans prend fin et qu’il ne peut pas se représenter. Cet acte contraire à la Constitution marque le passage de la Deuxième République au Second Empire.
Le 2 décembre, jour anniversaire du sacre de l’Empereur Napoléon I^er, son oncle, Louis-Napoléon Bonaparte dissout l’Assemblée nationale. Il annonce la rédaction d’une nouvelle constitution et de nouvelles élections. Il cherche ainsi à écarter le pouvoir législatif et à utiliser la popularité liée à son nom pour se maintenir à la tête de la France.
Des ouvriers, des intellectuels, les « républicains », s’opposent à ce coup d’État. Mais en quelques jours la résistance est réprimée dans la violence et le sang partout en France, et certains sont exilés, comme Victor Hugo.
Le 21 décembre 1851 les électeurs répètent leur confiance à plus de 90 % des suffrages exprimés, le 2 décembre 1852, Napoléon III est sacré Empereur.

Léopoldine naît en 1824, et demeure, malgré les naissances de ses frères et sœur, la plus proche de son père. Sur ce tableau, elle tient à la main un livre d’heures de Basse-Normandie, ouvert à un feuillet représentant une dormition de la Vierge. La scène se révèle assez prémonitoire, lorsque l’on sait qu’après son mariage, Léopoldine s’installe à Villequier, en Basse-Normandie, où elle trouvera la mort en se noyant avec son mari. Le tableau, réalisé pour ses onze ans, fut installé par Victor Hugo dans la salle de billard où il est resté jusqu’en 1947.

Dès l’abandon d’Histoire d’un crime, Victor Hugo entreprend Napoléon le Petit, un virulent pamphlet écrit en un mois, qui tire son titre de l’apostrophe lancée par Victor Hugo le 17 juillet 1851, lors de son discours sur la révision de la Constitution : « Après Napoléon-le-Grand, je ne veux pas de Napoléon-le-Petit ». Le livre fut publié le 5 août, jour du débarquement de la famille Hugo à Jersey. Les traits de plume qui ponctuent les pages de ce brouillon, griffonné sur un numéro de La Nation de Bruxelles, témoignent de la rage qui animait la veine sarcastique de l’inspiration.

Gwynplaine, le héros du roman L’homme qui rit, a la bouche fendue jusqu’aux oreilles en un rire éternel et mélancolique, car c’est le fruit d’une défiguration. Avec Ursus, le bonimenteur, et Dea, une jeune fille aveugle, ils forment une troupe de comédiens ambulants dans l’Angleterre du tournant du XVII^e et du XVIII^e siècles. Gwynplaine apprendra qu’il est le fils d’un noble et tentera de faire entendre la voix du peuple à la cour. Publié en 1869, L’homme qui rit est un échec. Depuis, il a été l’objet de nombreuses adaptations au cinéma.

Victor Hugo commence la rédaction de ce roman le 16 décembre 1872 et la termine le 9 juin 1873, à Hauteville House. Guerre extérieure, guerre civile : la situation politique sur laquelle ouvre le roman présente plus d’une similitude avec celle qu’il vient de connaître. Dans ce feuillet extrêmement travaillé où la partie droite, réservée aux additions et corrections est entièrement envahie par l’écriture, Victor Hugo se livre à une étude philologique sur le nom « Tourgue », « abréviation paysanne (qui) signifie la Tour-Gauvain [...] On avait construit cette citadelle sur un de ces gros blocs de schiste qui abondent entre Mayenne et Dinan ».

À la demande de la Société des gens de lettres, Victor Hugo avait autorisé que soit organisée une lecture publique des Châtiments dont le produit devait financer un canon. Paris est alors assiégée par l’armée prussienne. Deux lectures eurent lieu les 5 et 13 novembre 1870 au Théâtre de la Porte-Saint-Martin ; leur succès en entraîna une troisième donnée gratuitement à l’Opéra. Les lectures permirent la fonte de deux canons : le « Châtiment » et le « Victor Hugo », peut-être dessiné ici, auquel sera consacré un poème de L’Année terrible, « Au canon, le V. H. »