L’œuvre de Daumier en résumé

Alphabet comique
L’immense caricaturiste que fut Honoré Daumier ne pouvait passer à côté de la veine des alphabets anthropomorphes qui, après avoir enflammé l’imagination des artistes du 16e siècle, connaît un véritable regain d’intérêt à l’époque romantique. Reconstituer le corps de la lettre sur le « profil » du corps humain, voilà bien un projet qui devait réjouir l’illustrateur passé maître dans la caricature de moeurs ! Acrobaties, mondes renversés, corps déformés ou dégingandés, le jeu est aussi ludique que drolatique. Chacun se prête à la rêverie et emprunte à un héritage commun. Hugo semble retrouver Daumier lorsqu’en 1839, dans son récit de voyage dans les Alpes il déchiffre le grand hiéroglyphe de la nature : « Avez-vous remarqué combien l’Y est une lettre pittoresque [....] un suppliant qui lève les bras au ciel est un Y ». Et, passant en revue toutes lettres, il commence : « A c’est le toit, le pignon avec sa traverse, l’arche, arx ; ou c’est l’accolade de deux amis qui s’embrassent et qui se serrent la main [...] ». Le peintre, illustrateur et affichiste André François reprendra lui aussi l’accolade du A de Daumier pour signer une composition engagée : A pour Afrique, Apartheid, Amitié dans Massin, La lettre et l’image.
L’évolution de l’œuvre de Daumier suit le rythme des changements de régime politique et des lois sur la presse, qui font alterner liberté et censure. Quand la satire politique devient impraticable il se réfugie dans la satire sociale. Il se moque alors des mœurs de personnages comme les chasseurs, les bas-bleus, les étudiants, les médecins, les employés, les hommes mariés, les locataires et les concierges, les bourgeois à la campagne…
Plusieurs séries tournent simultanément. Par exemple entre 1845 et 1848 en même temps que Gens de justice se poursuivent Philanthropes du jour, Les Beaux Jours de la vie, puis commencent Les Amis, Pastorales, Professeurs et Moutards, Actualités, Les Bons Bourgeois, Les Papas, Profils contemporains, Locataires et propriétaires, Tout ce qu’on voudra. Dans sa recherche d’abonnements ou de réabonnements, Philippon lance de nouvelles séries en fin de trimestre et en poursuit simultanément d’autres comme un feuilleton.
- 1836 : La série La Chasse paraît dans Le Charivari.
- 1837 : La série Croquis d’expression paraît dans Le Charivari.
- 1839 : Album des Cent et Un Robert Macaire.
- 1839-1842 : Les Mœurs conjugales, Les Baigneurs.
- 1840-1842 : Album des Bohémiens de Paris.
- 1841 : Les Physionomies tragico-classiques.
- 1841-1843 : Histoire ancienne.
- 1843-1844 : Les Baigneuses, et planches sur les Chemins de fer.
- 1844 : Les Canotiers parisiens, Les Bas-bleus, Les Philanthropes du jour.
- 1845-1848 : Trente-neuf lithographies des Gens de Justice.
- 1846 : Séries Les Bons Bourgeois, Les Papas et Pastorales.
- 1848 : Représentants représentés, une série de portraits de parlementaires ; série de lithographies tournant en dérision le combat des femmes socialistes.
- 1849 : Les Physionomies de l’Assemblée dans Le Charivari, mais aussi Les Physiologies, Les Suites caricaturales, La Grande ville, Le Musée Philippon, Les Mystères de Paris, Les Rues de Paris.
- 1851 : Les Physionomies tragiques, Avocats et plaideurs.
- 1853 : Croquis aquatiques.
- 1854 : Emotions de chasse.
- 1855 : Ces bons Parisiens.
- 1858 : Les comédiens de société, Les Croquis d’artistes, Boulevard, Souvenirs d'artistes, Bourgeois, Amateurs, Parisiens à la campagne.
Provenance
Cet article a été publié à l’occasion de l’exposition « Daumier. L'écriture du lithographe » présentée à la Bibliothèque nationale de France en 2008.
Lien permanent
ark:/12148/mmm0pk12dvg2z