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Focus

L’Afrique du nord dans l’Atlas Catalan

Les montagnes de l’Atlas
Les montagnes de l’Atlas

Bibliothèque nationale de France

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Particulièrement novatrice, la représentation de l’Afrique du nord dans l’Atlas catalan s’inspire à la fois des traditions cartographiques occidentales et de sources arabes. S’y mêlent mentions précises et contrées fantasmagoriques.

La partie la plus nouvelle de l’Atlas catalan est sans doute l’Afrique du Nord. Ici encore l’auteur laisse le continent inachevé puisqu’il l’arrête sans explication au cours du Niger, dessiné au reste très schématiquement. Mais il donne en revanche, pour la partie qu’il décrit, des informations que l’Occident ne connaissait pas encore, car il les tire du récit d’un voyageur arabe, Ibn Batoutah. Ce dernier, comme l’a écrit M. Mollat du Jourdin, « donne une réplique africaine au témoignage asiatique de Marco Polo ». Né à Tanger au début du 14e siècle, Ibn Batoutah était juriste de formation. En 1325, en bon musulman, il partit pour La Mecque compléter sa formation dans les écoles coraniques du Proche-Orient avec l’excellente habitude de ne pas revenir par un chemin déjà suivi. Après un quart de siècle de pérégrinations, il consentit, lui aussi, à confier ses souvenirs à un ami qui les rédigea à la manière d’un conte oriental. Le titre, le Rihla, est éclairé par le sous-titre : « Cadeau fait aux observateurs traitant des curiosités offertes par les villes et des merveilles rencontrées dans les voyages ».

Nomade d’Afrique et le seigneur de Guinée
Nomade d’Afrique et le seigneur de Guinée |

Bibliothèque nationale de France

L’auteur de l’Atlas catalan lui emprunte les localisations des villes de Melli (Niani), Tembuch (Tombouctou), Geugen (Gao) et Maynia (Niamey) visitées par Ibn Batoutah à dos de chameau. Des réalités sahariennes, l’artiste a représenté un Touareg montant un dromadaire. Le roi du Mali, une pépite d’or à la main, est le premier souverain noir à figurer sur une carte.

Les îles Fortunées, ou le Paradis, et l’Afrique
Les îles Fortunées, ou le Paradis, et l’Afrique |

Bibliothèque nationale de France

Sur la côte atlantique, l’auteur nous montre à nouveau la quête obsédante de l’or, tentée cette fois du côté de la mer. Nous voyons le départ de l’expédition malheureuse de son compatriote Jaime Ferrer, parti en août 1346 vers le Riu del Or, le fleuve sur les rives duquel se troque le métal précieux. Les archipels des Açores, de Madère et des Canaries n’ont plus de mystère pour les marins catalans. Ils sont bien présents et l’île mythique de Brazil, que d’autres cartes situent en des endroits variables, notamment au large de l’Irlande, a été assimilée à une terre connue et ne fait qu’un, ici, avec l’île de Terceira aux Açores. Les vieux mythes ne subsistent plus que dans la légende inscrite à l’extrême gauche. Là sont évoquées les îles Fortunées, terres bienheureuses dont parlent les auteurs latins Pline et Isidore de Séville et où abondaient, croyait-on, les arbres, les fruits et les oiseaux. Depuis l’Antiquité elles marquaient traditionnellement le bout du monde, là où, nous dit le commentaire, erraient les âmes des païens après la mort. Avec une logique et une symétrie toutes médiévales, les anciennes cartes situaient le paradis des chrétiens, berceau de l’espèce humaine, dans la direction opposée, en extrême Asie ou dans une île au large de la Chine.

Il n’y a pas lieu de nous attarder ici sur la configuration de l’Europe. Soulignons seulement le progrès du tracé de la côte atlantique. La France et les îles Britanniques sont devenues reconnaissables, malgré le grossissement excessif de l’Irlande.